20h40 : il est l’heure ! Sur le porte-bagage du vélo, je fixe le panier contenant les costumes des autres scènes – ah, cette fameuse bicyclette qui parcourt comme une folle les rues de Blois une fois l’an, me fait voyager entre 2017 et 1944… Elle est quasi d’époque, ses freins aussi (…) 20h45 : le béret est fixé, le gros gilet, enfilé, la barbe, rasée de près (!), les cartes de rationnements sont dans la poche de droite. Celle de gauche contient les bouts de clopes et les quelques allumettes, rescapées de la restriction imposée par l’Occupation. Je souffle…
20h47 : je jette un dernier regard dans le miroir, j’ai bien retiré mes boucles d’oreilles… Je ne me vois plus. (…) Celui qui me fixe a des yeux sentinelles aux reflets mitraillettes. Il est impatient de partir, de poursuivre ses missions, de rejoindre ses camarades et d’embrasser le souffle vivifiant de celle qui le fait vibrer : la résistance. 20h49 : Gabriel porte son vélo sur l’épaule, monte les escalier, allume un bout de mégots pas frais. Il crache, respire un grand coup, appuie sur les pédales. Ne pas être en retard. L’exactitude est importante quand on a rendez-vous après le couvre-feu…
20h55 : La balade en vélo dure 5 minutes. On chantonne la Version de la Lili inventée par Raymond Casas* et Gilbert Aubry* – Gabriel aime à l’avoir en tête quand il sort, elle lui donne les ailes et l’aplomb nécessaires… Je lui laisse le guidon et me concentre sur la partition de ce soir : si Gabriel a du boulot, il en va de même pour moi. Lui, part distribuer des tracts clandestins, jouer au chat et à la souris avec les Chleuhs pour ne pas se faire embarquer… / moi, je pars jouer une histoire qui doit (absolument) embarquer les centaines de spectateurs présents ce soir. Ne rien oublier, les enchainements, le texte, les chansons… Pourvu que ça fonctionne !
21h00 : fin prêts le long de l’église Saint Nicolas, nous attendons le signal. Je profite de ce répit pour me concentrer… Ce n’est pas simple ce soir, la fatigue d’une année 2017 très chargée se fait sentir… Gabriel n’en a cure, il veut bondir et être à la hauteur de ses potes : ceux qu’il a quittés en 44, ceux qu’ils l’ont quitté depuis – et plus précisément en 2016, Raymond Casas et Pierre-Alban Thomas, dit Pat. (…) L’émotion est là.
À nos étoiles…
Quand je joue la Libération (Contée ou blésoise), j’aime à confier la représentation aux vrais héros de l’histoire, héros célestes – Fito, Polyte, Gilbert, Mazille, Henri, Maxime… En ce 11 août 2017, je m’adresse aux deux nouvelles étoiles, Raymond et Pat. Le signal ! Je respire profondément, tout se bouscule dans ma tête… Et comme toujours, je m’en remets aux vrais protagonistes : Allez les gars, vous aidez Gabriel et vous faîtes le job ! Je ne suis plus là, Gabriel vient de s’élancer, j’ai juste le temps d’apercevoir le public… Nombreux, curieux, sympa ! C’est parti…
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Dans un même souffle…
La lune rousse s’est levée sur la Loire en même temps que les paroles d’Églantine… La nuit est douce, la soirée qui s’achève aussi. Toute l’équipe artistique et technique a couru dans tous les sens, Laurent Quilichini a donné vie à la ville d’antan, le public a joué le jeu jusqu’au bout. Les étoiles ont brillé fort, ce soir. Le Chant des Partisans a résonné dans les cœurs et les yeux brillants, souriants des spectateurs. Tous dans un même souffle ! Une soirée magnifique…
Je retire le béret de Gabriel, celui de Raymond, de Pat et de tous les autres… Merci à tous ! Les spectateurs sont encore bercés par les Partisans, des scènes habillent encore leurs regards, ils sont bien et ne veulent pas partir… Un poème de Raymond Casas est lu. (…) Sa plume chatouille le devoir civique de chacun et chacune. Le charme de Libération à Blois ! opère encore, et même s’il faut partir, on sent qu’il va nous suivre… Comme un souffle entrainant !
La suite !
Pour libérer Blois dans les rues, rendez-vous l’année prochaine. Mais pour retrouver Gabriel, n’attendez pas un an : La Libération, Contée se joue le 1er octobre 2017 à la Tour Beauvoir, à Blois. Qu’on se le dise !-) Belle suite estivale.
Photos © Minna, Shazen, Claudieoll
Magnifique ! Émouvant ! Envoutant et culturel… Bravo !
Joué merveilleusement bien ! Bravo.
Une balade pour le souvenir et que vive la Mémoire pour nos libertés ! Merci – et surtout pour ce final très émouvant !
Très beau spectacle ! Merci.